information par et pour les luttes, Rennes et sa région

I - Communiqué de l’îlot U

Rennes
Ecologies - Aménagement du territoire

L’îlot U de la ZAC Baud-Chardonnet, devenu un espace d’expérimentation maraîchère et architecturale au printemps 2020 est menacé de destruction par la Ville de Rennes. Un événement de jardinage collectif aura lieu le 7 mai pour faire mieux connaître le lieu et le soutenir.

Depuis deux ans, cette friche, située entre la Vilaine et le campus universitaire de Beaulieu, s’est mue en espace d’agriculture urbaine, d’artisanat et d’expérimentation architecturale. Ce terrain est un espace de convivialité, d’apprentissage collectif et d’entraide. Sa situation paysagère en fait également un espace de lenteur, de calme et de contemplation. Les hautes herbes, les cabanes et la mare -remplie de grenouilles- en font un espace préservé où animaux, végétaux et présence humaine semblent pouvoir cohabiter. Un espace de liberté écologique pour les enfants comme pour les adultes. Ici, les grands se réunissent, travaillent la terre, débattent, pique-niquent, pendant que les plus petits s’inventent un monde ou observent la vie dans la mare. Cet endroit est le résultat d’une réelle appropriation collective spontanée et participative de l’espace public. Cependant, la mairie -pourtant àmajorité social-écolo - s’évertue à se fermer aux initiatives citoyennes sur l’espace commun, quand bien même celles-ci iraient dans le sens du programme pour lequel la majorité municipale a été élue.

Dans l’accord programmatique entre les listes PS et EELV de juin 2020, plébiscité à 65,35% par les électeurs et électrices, on peut y lire des engagements qui semblent alignés avec les évolutions récentes de ce lieu :

  • Agriculture urbaine : « Nous développerons une agriculture urbaine de proximité et réservons les grands espaces naturels dans la ville ».
  • Économie circulaire : « Nous créerons un schéma du réemploi ambitieux et y affecterons les moyens nécessaires. » ; « Bâtir de véritables plans de récupération et réutilisation des matériaux (économie circulaire*). ».
  • Condition animale : « Nous travaillerons sur la condition animale dans la ville ».
  • Végétalisation : « un plan ambitieux de végétalisation de l’ensemble de la ville […] végétalisation massive des quartiers ».
  • Jeunesse : « Nous voulons favoriser les lieux informels et d’usage mixte dans les quartiers, des tiers lieux, que les collectifs de jeunes ou les associations peuvent investir de façon ponctuelle ou permanente, parfois en collaboration avec des entreprises de l’Économie sociale et solidaire. ».
  • Insertion et hébergement solidaire : « Rennes, ville d’accueil […] nous travaillerons avec les communes de la Métropole à une métropolisation de l’hébergement solidaire avec mise à disposition de logements dans les communes et construction d’habitats légers et modulables pour l’hébergement d’urgence. ».

Difficile de ne pas voir dans l’îlot U la mise en œuvre concrète de ces lignes programmatiques théoriques. Mais à l’inverse, les choix politiques d’urbanisation continuent de menacer ce type de lieux, qui deviennent de plus en plus rares à Rennes. Il n’est qu’un des nombreux espaces menacés aujourd’hui, ou détruits hier, par cette politique d’artificialisation des sols liée à la construction de logements et de bureaux (vides pour beaucoup), souvent standardisés et verticaux.

Malgré toutes ses qualités, cette friche a le défaut d’être par endroits au-dessus des seuils de pollution pour la culture en pleine terre. Pour autant, cette pollution disparate ne devrait pas être un argument pour interdire toute culture ou utilisation du sol. La mairie utilise l’argument de la pollution pour proscrire toute expérimentation autonome quant à l’utilisation du sol. Un rapport de pollution du sol d’Enviropol-Conseils (que nous pouvons vous transmettre) concernant l’état des sols a été réalisé en décembre 2018 est sans ambiguïté : “Résultats montrant l’absence de dépassement des seuils réglementaires dans les végétaux cultivés”. Toujours selon ce rapport, une petite zone au nord du terrain est à proscrire pour certains usages car au-dessus des seuils recommandés en métaux lourds : “Secteur à proscrire pour un usage de culture ou d’élevage et à maintenir sous un recouvrement végétal ou minéral”. Ça tombe bien, cette zone n’est pas cultivée !

Depuis quelques semaines la mairie a acté la destruction des cabanes et des espaces d’artisanat, afin d’avoir champ libre pour y construire dans quelques années des logements et des bureaux. Cette fois, les élu.es utilisent l’argument de l’installation sur le site de l’îlot U de l’Elaboratoire, un lieu occupé depuis vingt ans par un collectif artistique et qui depuis des années est devenu une véritable institution.

Ce n’est pas l’Elaboratoire qui souhaite la disparition des cabanes, des espaces d’artisanat et des activités agricoles, mais bien cette mairie qui prépare les lieux pour mieux poursuivre l’aménagement minéral, vertical et standardisé et enrichir davantage les promoteurs immobiliers. Ce lieu est à l’inverse l’émanation d’une appropriation écologique, frugale et singulière de l’espace commun.

En 20 ans, la Bretagne a vu doubler ses surfaces artificialisées avec ce que cela comporte de pollution des sols, de recul de la biodiversité, de perte de surface cultivable et de dégradation qualitative des paysages. Et alors que la récente loi Climat-résilience promet de diviser par deux sur les dix prochaines années l’artificialisation des sols par rapport à la précédente décennie, les chantiers continuent de fleurir. Au sein de Rennes Métropole, la bétonisation semble inarrêtable. Le site de la Prévalaye, composé de prairies naturelles et agricoles, de bois et de jardins collectifs est notamment menacé par l’extension des infrastructures d’entraînement du Stade Rennais, ou encore le projet éhontément appelé « écocité » de Viasilva, qui a pour objectif d’artificialiser pas moins de 650 hectares. Plus loin, c’est la rocade de Fougères ou l’implantation de l’usine Bridor à Liffré qui menace.
Sans oublier la Courrouze, dont les espaces naturels continuent d’être détruits.

Notre communiqué a pour objectif de dénoncer encore une fois le mépris de la Ville de Rennes pour ses habitant.es, de dénoncer un double discours entre son programme et ses actes.

Nous demandons la préservation de ce lieu comme espace d’expérimentation maraichère, la préservation des cabanes construites de façon artisanale avec des matériaux de récupération et l’expérimentation de l’habitat réversible (ou « léger ») comme le stipule une nouvelle fois le programme de la majorité municipale. Nous souhaitons donc sa sauvegarde sans contrôle, et que fort de sa médiatisation, qu’il devienne plus que jamais un lieu d’expérimentations, de rencontres, de réflexions sur la ville et son aménagement.

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