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Prison de Rennes-Vezin : des proches portent plainte, des prisonniers refusent de reintégrer leur cellule

Vezin-le-Coquet
Répression - Justice - Prison Soins - Santé - Psychiatrie - Médic

Le mouvement des matons a de lourdes conséquences pour les personnes incarcérées : privation de parloir, de douche, de promenade, blocage par les surveillants des extractions, du courrier, etc.

À Rennes, des proches ont porté plainte mercredi tandis que les prisonniers refusaient de reintégrer leur cellule ce jeudi.

Au 12e jour de grève des surveillants et alors qu’un large espace médiatique est consacré aux revendications des syndicats, peu s’intéressent à leur impact immédiat sur le quotidien des personnes détenues.

« Les détenus sont restés enfermés dans leur cellule depuis trois jours. La tension devait être extrême dans les deux maisons d’arrêt. Je ne sais pas comment ils ont pu déjeuner et dîner  » alerte une personne intervenant au centre pénitentiaire de Riom. Confinés de jour comme de nuit en cellule – parfois à trois dans 9m2 – faute de personnels pour ouvrir les portes, le mouvement des surveillants c’est aussi et surtout, pour les détenus, un blocage du fonctionnement de la prison : des activités suspendues, des douches, des promenades, des rendez-vous annulés, des communications avec l’extérieur coupées, des cantines non acheminées (donc un accès limité à des produits d’hygiène, des denrées alimentaires ou du tabac). Des dysfonctionnements qui vont jusqu’à l’absurde : à Longuenesse, les déjeuners auraient été distribués par les Équipes régionales d’intervention et de sécurité (Eris). L’accès au téléphone est encore plus restreint qu’à l’ordinaire, voire impossible ; dans plusieurs établissements, les courriers ne seraient plus distribués, ou alors avec un retard important. « Depuis quelques jours, absence de parloir, de promenade. Je ne peux pas voir ma femme depuis sept jours. Aujourd’hui, nous avons été enfermés totalement et n’avons eu qu’un léger repas à 16h30, rien d’autre », raconte un détenu dans un message envoyé à l’OIP.

Les effets de la grève sont aussi immédiats à l’extérieur des murs : dans la plupart des établissements bloqués, les parloirs familles et les rencontres en unités de vie familiale ont été supprimés. Une violence de plus pour les proches de détenus, qui font parfois des heures de route pour des rendez-vous pris longtemps à l’avance et apprennent une fois sur place l’annulation de leurs rendez-vous. Après des trajets souvent coûteux, certain.es ont dû dormir à l’hôtel. Ainsi, une famille a fait 650 km pour partager 24h en unité de vie familiale (UVF) avec leur proche incarcérée. Après une journée d’attente à l’extérieur de la prison, dans la pluie et le vent, sans information fiable sur la possibilité ou non d’accéder à l’UVF, ils sont finalement contraints de passer la nuit à l’hôtel. Pour voir leur visite à nouveau annulée le lendemain.

Enfin, des rendez-vous médicaux et des extractions vers les hôpitaux ont été bloqués, des traitements non distribués… A Nantes, au Havre, à Riom, des soignants ont tiré la sonnette d’alarme. «  Toutes les activités, rendez-vous ou soins ont été annulés car aucun personnel n’a pu rentrer, y compris dans les bâtiments administratifs. À 11h, deux infirmières ont fini par être autorisées à accéder aux zones de détention pour distribuer les médicaments », témoigne un intervenant. « Les malades psychiques et toxicomanes doivent sacrément souffrir, j’espère qu’il leur reste du tabac », ajoute-t-il.

Des avocats ont par ailleurs signalé à l’OIP l’annulation des rencontres avec leurs clients, ainsi que le report des extractions judiciaires. A Nantes, une audience de comparution immédiate a été reportée d’un mois : autant d’hommes qui se voient contraints de passer un mois en détention provisoire… « C’est le branle-bas-de combat à tous les étages du tribunal », témoigne un avocat, qui confirme que, sur place, la désorganisation de la justice est totale.

Premières victimes des blocages, les détenus et leurs proches lancent pourtant l’alerte depuis le début. Dans plusieurs prisons, des mouvements collectifs s’organisent pour attirer l’attention (à Fresnes, Fleury, Maubeuge, Sequedin, Pau), se manifestant surtout par des refus de regagner les cellules à l’issue des promenades. Des familles de détenus tentent aussi de faire entendre leur indignation et leur désarroi. « Je comprends bien entendu les appels à l’aide des surveillants mais ont-ils le droit de les traiter comme des animaux (et encore… dans les refuges les animaux ont droit à leur promenade quotidienne). Actuellement des familles entières n’ont aucune nouvelle de leurs conjoints, frères, pères » témoigne un proche.

Dans un contexte où les tensions s’accroissent dans des établissements surpeuplés, ces actions – inédites dans la plupart des prisons bloquées – ne peuvent qu’augmenter la souffrance intramuros et avec, les risques de violences que les personnels entendent pourtant dénoncer.

Observatoire des prisons - 23/01/2018

Rennes, mercredi 24 janvier :

Mercredi, sept familles de détenus du centre pénitentiaire de Rennes-Vezin ont porté plainte au commissariat pour protester contre la privation des droits dont souffrent actuellement leurs proches emprisonnés. Une requête en référé liberté a été déposée, cet après-midi, devant le tribunal administratif par un des détenus. Son avocat reproche à l’administration pénitentiaire de ne pas respecter les droits fondamentaux des prisonniers, privés de tout à cause du blocage des surveillants.

Mercredi, sept familles de détenus du centre pénitentiaire de Rennes Vezin ont porté plainte au commissariat pour protester contre la privation des droits dont souffrent actuellement leurs proches emprisonnés. Une femme, venue de Carcassonne, a fait le trajet pour rien. Les parloirs étaient annulés à cause du blocage des surveillants.

« C’est une grave atteinte à la dignité humaine, dénonce Me Jean-Guillaume Le Mintier, avocat. Les détenus ne peuvent plus voir leur famille, ne vont plus au travail, ne peuvent plus cantiner. Ils sont confinés tous les jours depuis le début du mouvement des surveillants dans leur cellule, sans promenade, sans voir la lumière du jour. »

L’avocat a a déposé cet après-midi, une requête en référé liberté devant le tribunal administratif de Rennes. La juridiction dispose de deux jours pour réagir. « Nous demandons au tribunal de faire cesser le trouble et de rétablir les droits fondamentaux des détenus, poursuit Me Le Mintier. Une expertise devra être faite à la demande du juge pour vérifier sur place la véracité de nos griefs. »

Rennes, jeudi 25 janvier :

Ce jeudi 25 janvier, vers 16 h 30, 76 prisonniers du centre pénitentiaire Rennes-Vézins ont refusé de regagner leurs cellules.
« Nous sommes dans une réaction ayant un lien avec le mouvement national, même si aucune revendication n’a été formulée par les détenus », précise Boris Targe, secrétaire général de la direction interrégionale de l’administration pénitentiaire.

L’équipe rennaise [de psychiatres exerçant en milieu pénitentiaire NDLR] est éprouvée par la caution du non respect de certains points de loi. Elle se trouve notamment inquiète pour les patients qui parfois n’ont pas accès à leur traitement depuis plusieurs jours et qui sont exposés à de graves complications.

Rennes, vendredi 26 janvier :

Blocage des prisons. La colère des proches des détenus de Rennes-Vezin :

Alors que le mouvement de contestation des surveillants de prison perd de la vitesse, une partie des familles des détenus s’insurge contre les conditions de détention de leurs proches au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin.

« Nos détenus n’ont pas le droit de subir cela !  », s’insurge Camille, compagne d’un détenu du centre pénitentiaire de Rennes-Vezin.

Après 12 jours de grogne des surveillants, un important incident dans l’établissement jeudi et un élan de constestation qui perd de la vitesse, des proches des prisonniers tirent la sonnette d’alarme.

La raison ? La dégradation des conditions de vie de la population carcérale à la prison rennaise.

« Des détenus coupés de l’extérieur »

« Les surveillants bloquent depuis quelques jours, l’entrée aux familles de détenus mais également aux médecins, avocats, professeurs de sport et aussi les véhicules de livraisons en nourriture et produits d’hygiène », énumère la jeune femme de 25 ans.

En couple depuis trois ans, elle dénonce une situation « difficile ». « Les services de réservation des parloirs sont inaccessibles. Les cabines téléphoniques de la prison également. Les courriers ne sont pas assurés, proteste cette Vannetaise. Les détenus sont coupés de l’extérieur et des liens familiaux qui leur permettent de supporter leur détention ».

« On reste à l’intérieur, sans sortir »

Une dégradation importante qui oblige les prisonniers à rester confinés dans leurs cellules. « On reste à l’intérieur, sans sortir, depuis le début. Les surveillants nous font subir leur mouvement  », se plaint un détenu.

Selon lui, la communication entre prisonniers et personnels de l’administration pénitentiaire est rompue. « Il n’y a aucun dialogue », regrette-t-il.

La priorité des détenus ? « On veut juste des parloirs car nos familles sont inquiètes. »

« Ils s’estiment pris en otage »

Une situation délicate que les surveillants en grève reconnaissent. « Ils s’estiment pris en otage par le mouvement des surveillants, explique Hervé Villalon, délégué syndical de la CGT pénitentiaire.

« À l’intérieur il y a un service minimum qui a été mis en place : des repas le midi et le soir, le courrier fonctionne, la distribution des médicaments est habituelle, se défend le syndicaliste. Le petit-déjeuner a été servi en cellule. De manière générale, les services fonctionnent normalement mais un peu plus lentement que d’habitude. »
Piquet de grève levé

Après 12 jours, le mouvement va-t-il perdurer ? « Nous allons lever le piquet de grève ce week-end. Les parloirs seront de nouveaux possibles », concède le syndicaliste CGT.

Une décision qui fait écho à l’annonce du syndicat majoritaire Ufap Unsa de se retirer du mouvement après avoir validé, hier, les propositions formulées par le ministère de la Justice.

Ouest-france - 26/01/2018

Pour une mise en perspective, la parole est à l’Envolée

Les matons n’en sont pas à leur premier mouvement… chaque année quasiment, ils tentent le coup. Ils obtiennent toujours quelque chose. Bien sur ils ne gagnent jamais la considération d’une société qui, malgré sa paranoïa et ses penchants sécuritaires, continue à les mépriser. Ces porte clefs à perpétuité rappellent en effet par leur simple présence, qu’il y a des prisons, ces non lieux que tout le monde s’efforce d’oublier. Bien sur, ils ne gagnent rien pour les prisonniers ou pour améliorer les « conditions de détentions ». Bien sur, ce qu’ils gagnent, ils le gagnent toujours CONTRE les prisonniers : suppression de parloirs, de cantines, multiplication des fouilles, plus de moyens de contrôle, arsenal…

Nous reviendrons dans le prochain numéro du journal sur ce mouvement de janvier 2018 encore en cours ; et surtout sur ce qu’il implique et entraîne à l’intérieur pour les prisonniers. En attendant nous vous proposons la lecture d’un texte d’août 2013

Lire également la tribune d’un collectif de détenus en réponse au blocages des matons.

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