Lundi. Au saut du lit (ou presque).
Camping-car chargé, aérodynamie (on penche clairement en arrière…)
du bois, de la farine, des couvertures, des tentes, des manteaux.
Notre Dame des Landes – Calais
6h30 annoncées
12h envisagées, pied au plancher…
Il est pas tout jeune le camion, pfff, la voie véhicule lent nous ouvre les bras,
en 3e on se fait doubler par des convois exceptionnels…
Allez on va y arriver ! On est bien déter
et finalement 10h à peine et voilà déjà « c’est Calais »
C’est la nuit
il fait froid bien-sûr
mais on se dit que parfois ça doit être bien pire…
On se dirige vers la plage
un front de mer désert
des alignements de petits pavillons
tous identiques et qui semblent désertés pour la saison d’hiver.
Mais ça brille quand même, lampadaires design, asphalte neuf,
un bord de mer qui pourrait ressembler à tous les autres.
Ah si tiens, des cabines de plages, alignées par dizaines, toits colorés,
on est bien dans le nord c’est clair !
Et toutes ces lumières au bout de l’avenue c’est quoi ?
Le port bien sûr.
Et là, à l’horizon, l’immeuble flottant, si lumineux,
si près du rivage, c’est à ça que ça ressemble un ferry alors…
l’Angleterre accoste ici, en pleine ville à Calais,
la notion de frontière se rapproche…
On imagine les passagèr.e.s en train de fouler le sol français,
une foule de gens pour qui ce voyage, ce trajet, doit paraître souvent si anodin, banal,
quotidien peut être
Et quand les lumières du ferry s’estompent, on en distingue d’autres à l’horizon,
lointaines, diffuses, …, la côte anglaise.
Ah oui, si près…
enfin ça semble si près…
on comprend mieux les espoirs allumés par ces phares de l’autre terre, de l’Angleterre.
L’humeur s’assombrit aux pensées qui surgissent
face à cet océan, noir, ténébreux,
cimetière marin de corps et de rêves oubliés, tus
Quelques larmes silencieuses, une bière
L’impuissance est dans l’air…
Demain ! On se retrousse les manches,
les mains dans la farine ou les bras chargés d’affaires.
Pour un pti coup de main,
pour une goutte d’eau dans cet océan de maltraitance orchestrée
Début d’une dizaine de jours en soutien des exilé.e.s à Calais
Du hangar au Channel,
en passant par Philippe Poutou
Pour des raisons d’hébergement, aujourd’hui on déplace le fournil de Dunkerque à Calais pour les 4 prochaines semaines.
On dit au revoir aux copaines du hangar de Help4Dunkerque (pour les aider dans leurs actions hyper nécessaires, fais un don ici) et on leur souhaite bon courage pour alimenter les jungles [1] de Dunkerque. Nous on prend la route pour "Le Channel", un lieu culturel calaisien, armé·es de notre four mobile, de 600kg de farine et d’une tonne de bois.
Arrivé·es à Calais, c’est en face d’un collage massif d’affiches pour Bardella (bienvenue...) que se dévoile notre nouveau lieu de confection de pain : le centre culturel le Channel. Une "scène nationale", aussi immense que laissait présager son nom. Tout est grand, la scène, les bureaux, le restau, y’a un chapiteau bizarre imbriqué autour d’une tour, du bois sculté un peu partout (même les poignées de porte des toilettes !^^). L’accueil est au top et le confort assuré, même si c’est un peu étrange quand on sait qu’on va alimenter en pain des personnes qui vivent dans le froid et les expulsions quotidiennes.
En discutant un peu, notamment avec une personne du lieu qui nous héberge en mode dortoir, on apprend vite que le fonctionnement des distributions par les assos sont pas mal différentes ici. Avec les mauvaises conditions météo et le froid, c’est environ 600 personnes qui vivent dans une dizaine de jungle à Calais (environ 700 personnes à Dunkerque), toutes réparties en communautés, principalement des soudanais·es, et aussi un peu des egyptien·nes, des erythréen·nes, des syrien·nes et des afghan·es.
L’organisation des assos est plus cadrée car il y a parfois jusqu’à 1 500 personnes. Pour participer aux distributions du petit dej avec le pain qu’on a produit, l’association Salam nous propose de les accompagner sur 2 matinées dans la semaine, et on commence dans 2 jours.
Ces derniers temps, peu de traversées ont eu lieu. Les campements à Dunkerque commencent à grossir, et ça se ressent dans l’ambiance de plus en plus tendue entre exilé·es, passeurs & mafia. De ce qu’on a compris, c’est parce que les exilé·es qui vont à Dunkerque sont un peu plus fortuné·es (toutes proportions gardées) et ont souvent déjà payé leur passage vers l’Angleterre avant d’arriver. Iels doivent donc attendre quand les conditions de traversée sont mauvaises.
Contrairement à Calais où beaucoup essaient de s’auto-organiser pour passer en camion (mais avec plus de risque d’accidents) ou en trouvant de l’argent sur place pour payer la traversée.
A peine arrivé·es, et alors qu’on se balade dans la ville, on tombe sur une affiche d’un documentaire diffusé le soir même au cinéma de Calais "Il nous reste la colère". En plus, c’est en présence d’un des protagnistes principaux, notre failli président de la République Philippe Poutou ! Ni une ni deux on prend nos places pour aller voir la lutte qu’iels ont mené contre la fermeture de l’usine Ford à Bordeaux en 2018/2019.
Il n’est pas que joyeux car les réalisateur-ices ont pris le parti de montrer aussi les moments difficiles où les personnes en luttes se sentent parfois démunies, mais on vous le conseille.
Rdv dans 2 jours pour vous raconter notre 1re distribution avec l’association Salam.
Des boulanger·es de l’IBM
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