Elle a belle gueule la société quand on la regarde depuis le bord de la route. On la fixe, le pouce en l’air et elle se vide de tous ses beaux atours. Bas les masques, bandes de pleutres ! Voici venu le moment de vérité… Il va falloir trancher, se mettre à nu, admettre au grand jour ce que l’on a au fond du bide. Et continuer à vivre avec. Quels que soient les gestes que vous ferez juste après nous avoir croisé, les mots que vous trouverez pour nous répondre, ils seront transparents comme de l’eau de roche. Vous aurez beau les enrober de cette mauvaise foi dégoulinante, jouer du pipeau sur une jambe jusqu’à en perdre votre souffle, nous saurons. C’est l’une des grandes satisfactions de la pratique. A force de ronger son frein à l’ombre des pompes à essence, le stoppeur développe une forme de prescience. Bien sûr ça ne fonctionne pas à tous les coups. Il existe une marge d’erreur, des failles, des surprises – nous y reviendrons – mais dans la majeure partie des cas, je sais ce que vous pensez quand je termine cette petite phrase à la con B’jour, excusez, j’essaie d’aller en stop vers Bidule, je me demandais si vous pourriez m’avancer un peu ?
Je sais si je suis en terrain favorable ou s’il va me falloir batailler un peu. Un sourire pourra suffire. Un regard de chien battu qui dit Je suis vraiment dans la merde, il caille, ça fait des plombes que je suis planté là comme une éolienne à me faire balayer par le vent. Avec un peu de chance, si vous ne me claquez pas la portière au nez, je vais vous rappeler ce fils, ce petit-fils, ce voisin que vous aimez bien et dont vous savez qu’il lui est arrivé de faire du pouce. Je sais que vous finirez par craquer même si vous ne prenez jamais de gens comme moi d’habitude. Vous avez l’air sympa, je n’ai pas l’air d’un bandit de grands chemins, on devrait finir par s’entendre.
Mais là où l’on excelle avec les années...
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