Cet article est issu de notes prises à la main.
Il n’engage donc pas les intervenant·es.
Pdf de 2 articles dont celui-ci :
En page par page
Histoire de la colonisation
Résistance palestinienne
Intrication du genre
Pour des infos plus exhaustives sur l’histoire de la Palestine,
lire l’article « Gaza : le contexte historique »
Dans l’Histoire, la colonisation d’un territoire et d’un peuple condamne toujours les colonisé·es à un repli identitaire ainsi qu’à un fonctionnement social plus conservateur.
Au début du 20e siècle, l’idée de créer un État juif se développe chez certain·es juif-ves ultra-nationalistes : le sionisme est né. Après des hésitations sur le lieu d’établissement de cet État (l’Ouganda fut une piste sérieuse), les sionistes décident de l’installer sur des terres déjà habitées : la Palestine. Cela se fait avec le soutien d’armées occidentales, notamment britannique, mais aussi en coopération avec des courants antisémites qui voyaient d’un bon oeil l’établissement des juif-ves loin de l’Occident..
Il y a toujours eu des résistances palestiniennes face aux violences coloniales
En 48, Israël déclare son indépendance et impose un premier plan de partage de la Palestine par la force, sans s’accorder avec les palestinien·nes. S’ensuit la "Nakba" (= "Catastrophe" en arabe), ou l’exil forcé de centaines de milliers de palestinien·nes fuyant les combats, les expulsions et les massacres israéliens. L’accaparement des terres palestiniens, qui s’opérait jusqu’ici par le rachat des terres mais était peu efficace, se fait dorénavant par la violence armée et à vitesse grand V.
Il y a toujours eu des résistances palestiniennes face aux violences coloniales.
Dans les années 60, cette résistance politique est beaucoup menée par l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine, une coalition de différents groupe palestinien) qui est de tradition marxiste, plutôt progressite, avec une branche armée. Cette organisation est de fait traversée par des luttes internes qui portent sur les enjeux féministes.
Dans les années 80, pendant la guerre du Liban, l’OLP accepte de faire des négociations avec l’ONU et des représentants d’Israël : celles-ci aboutiront aux fameux accords d’Oslo de 93.
Les engagements de l’accord seront respectés par l’OLP, mais pas par Israël. De là nait un sentiment de trahison des palestinien·nes envers l’OLP.
Dans ce contexte, un autre groupe politique bien connu commence à prendre de la place dans les résistances palestinien·nes : c’est le Hamas. Il devient de plus en plus populaire. A la base, c’est un groupe religieux de la pensée islamiste qui laisse moins de place pour les luttes de femmes que l’OLP.
Israël a toujours porté des valeurs progressistes en apparence, notamment sur les questions féministes, pour rester dans le camp occidental. Mais dans les faits, les luttes des femmes et personnes queer n’avancent pas.
Dans les années 2000, il s’opère un renforcement des partis conservateurs, que ce soit à Gaza, comme en Israël, qui entrent dans un replis identitaire.
Cette mise en contexte parait hyper importante pour comprendre ce qu’il se déroule aujourd’hui.
L’attaque du 7 octobre 2023
Avant de parler du 7 octobre, nous vous conseillons d’aller lire l’article de Sarah Rahnama : « "Viol" du hamas, ou comment Israël instrumentalise la peur à l’égard des hommes musulmans pour justifier ses attaques à Gaza »
Le 7 octobre dernier donc, les branches armées du Hamas et d’autres mouvement palestiniens attaquent des territoires occupés par l’État d’Israël. Depuis toujours, Israël utilise la désinformation comme outil colonial : contrôle, stratégie communicationnelle, propagande (la France a fait pareil en Algérie). Par exemple,les gouvernements israéliens racontent régulièrement qu’il n’y avait personne en Palestine à leur arrivée [1].
Israël est vu comme le bastion
occidental au Moyen-Orient
Après le 7 octobre, la même propagande s’est mise en place. Et tout le monde y a cru facilement parce qu’il y a un terreau islamophobe construit depuis des décennies. Il y a des aller-retour entre les rhétoriques d’Israël et les récits internationaux racistes.
Plusieurs exemples :
- Quand l’Afrique du Sud a attaqué Israël pour génocide et nettoyage ethnique des palestinien·nes, voici leur défense : « La machine à violer du Hamas porte l’entière responsabilité morale de toutes les victimes de cette guerre qu’il a lancée le 7 octobre et qu’il mène à l’intérieur et sous les écoles, les mosquées, les maisons et les installations de l’ONU ». [2]
- Début décembre, quand le Guardian a commencé à mettre en doute certaines accusations de viol systématique du Hamas par Israël, ce dernier en rajoutera une couche. Le but ? Alimenter en permanence les pensées racistes en nous.
- Le 5 décembre, Netanyahou a expliqué que le « viol de femmes israéliennes » était la preuve de la dépravation du Hamas, dont « l’extinction » nécessitait une « force écrasante » à Gaza
- Le président israélien Isaac Herzog est intervenu sur la chaîne télévisée d’information américaine MSNBC pour présenter la guerre contre le Hamas comme une guerre menée « pour sauver les valeurs de la civilisation occidentale »
# Intervention du public #
Israël est le gendarme de l’Occident pour mettre au pas le Moyen-Orient.
Un exemple : Drahi, franco-israélien, a versé 7,7 millions de dollars à Israël pour financer la construction d’un centre de remise en forme pour les soldats de Tsahal. C’est lui qui possède BFM TV, i24News, RMC, Libération... Pas étonnant que l’on soit abreuvé du discours d’Israël dans les médias.
Israël est vu comme le bastion occidental au Moyen-Orient. Pour beaucoup, c’est positif. Mais pour nous, l’État d’Israël fait du pinkwashing, c’est-à-dire qu’il instrumentalise les femmes et les queers ainsi que leurs luttes pour faire croire qu’il est du bon côté de l’Histoire [3].
Quand le Hamas remporte les élections législatives palestinienne en 2006, les luttes des femmes et queers se sont réduites. Mais il y a des luttes internes, des luttes civiles qui existent.
Le discours qu’on nous rabache c’est : islamiste = barbare = anti-progressiste = contre le droit des femmes.
Il est constamment mis dos à dos : société orientale = barbare // société occidentale = progressiste. Ça s’appelle de la déshumanisation.
Pour autant, les palestiniennes participent pleinement aux luttes de libération de la Palestine. Que ce soit par l’entretien d’une culture de la résistance, le soutien aux détenus, le maintien d’un tissu social solide, la gestion des charges quotidiennes, l’organisation des marches du Retour de 2018-2019...
Parler des crimes sexuels
en déconstruisant
son instrumentalisation
Cela fait 75 ans que les crimes sexuels sont une arme de l’État d’Israël, ça plus les tortures, les violences sexistes et sexuelles, l’enfermement, les traitements dégrandants... Dans l’idée de traumatiser les résistances. Et cela sur les femmes, sur les hommes et les ados.
# Interv’ du public #
Dans tous ces pays qui ont colonisé le Moyen-Orient, les femmes ont toujours été les premières visées et attaquées par les colonisateurs. Après le 7 octobre, il y a eu deux séquences dans la propagande israélienne :
1. Les palestiniens sont tous des terroristes et les femmes des génitrices de terroristes (s’appuyant sur l’islamophobie des sociétés occidentales)
2. Mise en avant des crimes sexuels soit-disant utilisés comme arme systématique par le Hamas
Dans les milieux de gauche, on ne pense pas que tous les palestiniens soient des terroristes, mais par contre il est très courant d’entendre qu’ils sont tous des oppresseurs en puissance.
C’est sur ce préjugé que se base la tribune publiée dans Libération en décembre 2023, « Pour la reconnaissance d’un féminicide de masse en Israël le 7 octobre » :
- Dans cette tribune, la question des violences sexistes et sexuelles est totalement dépolitisées : « Cet appel n’est pas politique. Cet appel est purement féministe et humaniste ».
- Autre dinguerie : « C’est ce féminicide de masse que nous devons regarder en face, sans le lier au conflit israélo-palestinien. ». En plus, ils isolent les crimes sexuels du contexte colonial. Or, on ne peut pas penser une seule question en Palestine sans prendre en compte le contexte colonial : celui-ci est partout, tout le temps.
- Une tribune signé par Arié Avidor et Daniel Shek, deux anciens ambassadeurs d’Israël...
Le prisme principal en Palestine, c’est la colonisation. Si l’on veut que les crimes sexuels liés à la colonisation s’arrêtent, il faut tout simplement décoloniser. Ça n’est pas sous un régime colonial que les idées progressistes avanceront.
#Interv’ du public #
Dans toutes les guerres coloniales, l’enjeu de libération des femmes a toujours existé. Les décolonisations imparfaites ont silencié les luttes féministes passées.
Contexte du 7 octobre
Le Hamas est à la base une organisation sunnite [4] financé entre autres par le Qatar. Cette organisation a des convictions focalisées contre la colonisation israélienne, et elle ne met pas en avant la religion. Le Hezbollah, elle, est une organisation chiite.
Leur entente n’est donc pas simple : il y a eu beaucoup de tensions entre eux sous fond de mécompréhension religieuse. Pourtant, en 2019, ils créent une alliance pour attaquer Israël sur des territoires colonisés : c’est l’attaque du 7 octobre.
Le Hamas s’est formé en Iran, se préparant pendant 4 ans. Ils ont utilisé des tunnels pour sortir et re-rentrer de Gaza, sous blocus total par Israël depuis 2007. Des pièces détachées de matériel militaire ont aussi emprunté les tunnels pour atteindre Gaza.
Les objectifs de l’attaque :
- Faire tomber le dôme de fer, la protection anti-missile financée par les USA et réputée infranchissable
- Parvenir à une attaque au sol visant la caserne qui gère la sécurité et le checkpoint de Gaza
Les soldats pensaient réussir à rester 1h sur place. Mais la lenteur de la réaction israélienne a fait qu’ils sont resté 7h. Après 75 ans de violence coloniale, en étant parti avec l’idée qu’ils allaient mourir, que beaucoup de civils israéliens aux bords de Gaza sont armés ou ont accès rapidement à des armes, tristement ces violences sont inévitables.
Mais celles-ci viennent toutes de la colonisation. Il faut sortir du prisme de la cruauté (« Le barbare, c’est d’abord celui qui croit à la barbarie », Levi-Strauss), mais questionner d’où viennent ces terribles violences, physiques, sexuelles.
Pour supprimer les violences liées à la colonisation, il faut décoloniser, point.
Il n’y aura pas de luttes progressistes victorieuses, que l’on parle de féminismes ou autres, dans un régime colonial.
# Interv’ du public #
Dans l’attaque du 7 octobre, il y avait toutes les composantes de la résistance palestinienne : le Fatah, le FDLP (Front Démocratique pour la Libération de la Palestine), le Djihad islamique, le FPLP (Front Populaire de Libération de la Palestine)... Alors que les différends politiques entre ces groupes sont parfois importants, ils ont le même ennemi commun : la colonisation israélienne.
Les combattants du 7 octobre sont les frères et fils des nombreux-ses mort·es et mutilé·es des marches du retour de 2018-2019, marches totalement pacifistes.
La société colonisatrice vit dans le fantasme d’une décolonisation d’une violence sans nom, et s’auto-alimente là-dedans. En Israël, tous les groupes politiques, de droite comme de gauche, défendent la colonisation. Si beaucoup sont contre Netanyahou, ils restent dans leur quasi-totalité pour la colonisation.
Comment s’y raccrocher d’ici ?
Nous sommes les héritier·es d’une société coloniale qui a colonisé le Moyen-Orient.
Pour lutter contre la colonisation là-bas, il nous faut lutter contre les idéologies coloniales ici.
Ne pas penser que les arabes ou les musulmans sont des communautés simples et homogènes.
Ressources partagées à l’atelier :
• « Derrière les fronts » & « Moudjahidate », film d’Alexandra Dolls
• « Kiff ta race », podcast de Rokhaya Diallo et Grace Ly
• « La matrice de la race », livre d’Elsa Dorlin
• Tout le travail de Case Rebelles, collectif PanAfroRévolutionnaire
• « Persepolis », bd de Marjane Satrapi
• « Féminisme islamique », livre de Zahra Ali
• Les ressources de Lallab, association féministe et antiraciste
• Les oeuvres poétiques de Mahmoud Darwich
Suivre le travail des collectifs :
• Tsedek · Collectif juif décolonial
• Rima Hassan · juriste palestinienne
• @ARAR_décolonial
• @Ag.Palestine.35
• @HorizonPalestine
• @Comité.soutien.palestine.R2
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