information par et pour les luttes, Rennes et sa région

Maison d’Arrêt de Caen : l’horreur quotidienne dénoncée par des détenus.

Caen
Répression - Justice - Prison

Lettres extraites de l’émission de l’Envolée du vendredi 7 octobre 2022, depuis la Maison d’arrêt de Caen, qui décrivent les conditions affreuses dans cette taule, entre les cours de promenade insalubres et les matons qui poussent à bout. On rappelle que des prisonniers avaient pris la parole il y a un an pour dénoncer la mort de Youssef, leur codétenu, dans cette prison (on peut retrouver leur lettre ici).

📻 Écouter l’émission complète 📻

 ¤ Première lettre ¤ 
"Les bâtiments aux normes de 1945, la mentalité des matons datent visiblement de la même période"


« Gros Big Up à L’Envolée !

J’écris depuis la maison d’arrêt de Caen, Duparge. L’omerta carcérale fait loi ici, comme dans la majorité des prisons en France. Mais ici on est un peu plus gâtés, laissez-moi vous en raconter quelques unes.

Les suicides, les matons fachos fachés qui y poussent, on oublie pas le poto Youssef, mort au 3e étage du bâtiment grande galerie qui a été poussé à bout. Des parloirs sans box ni séparation, aucune intimité pour les familles, les tables sont espacées de 56cm entre-elles, on doit gueuler pour s’entendre, surveillé.es par une matonne et des caméras. On a ni UVF, ni parloirs familiaux pour pouvoir profiter de nos proches avec un minimum d’intimité.

Les matons qui ouvrent les fenêtres des coursives pour fumer : les pigeons entrent. Les coursives et les escaliers sont couvertes de merdes de pigeons, il y a en partout, pratiquement jusque dans la gamelle.

Des cours de promenade dégueulasse avec un robinet pour tout le monde, avec un mini filet d’eau calcaireuse imbuvable quand elle n’est pas coupée. Un pissoir par promenade, surveillé par caméras, toujours bouché. Les auxiliaires font avec les moyens du bord et se retrouvent à devoir les vider avec une éponge et un sceau, c’est inhumain.

Pas de frigo, parce que l’installation électrique est vêtuste. On a le droit de cantiner une glacière électrique, 49,99€ pour ceux qui en ont les moyens.

L’ouverture des cellules à des heures pas possible pour les fouilles, parfois c’est à 23h, et quand ça leur dit, ils le font à 6 heures du matin.

Les cabines téléphoniques sont tout le temps en panne et fonctionnent à moitié quand elles ne le sont pas. Les bâtiments aux normes de 1945, la mentalité des matons datent visiblement de la même période, il n’y a que l’uniforme qui change.

Et puis comme dans d’autres prisons, la censure du journal du mois de juin. Arrivée un peu tardivement, ce qui nous a permis tout de même de lire l’article de Libre Flot, mais voilà, mi-juin, la censure est tombée et une fouille a été demandée pour chaque détenu abonné. Quelle belle surprise de rentrer de promenade et de voir la cellule retournée comme si ils cherchaient un portable ou des stups. Mais merde, vous êtes si dangereux que ça les potos ? Lol.

J’ai su par ma femme que d’autres prisons ont suivi, que les censures étaient tombées. Ça vient de la CGT Pénit’ ? C’est dommage qui ici on capte pas l’émission de radio, alors on verra pour le prochain journal si on finit pas tous au mitard. Lol. »

¤ Deuxième lettre ¤
"Moi j’ai bien analysé, Eux ils aiment pas les Arabes."


« Je dis bonjour à L’Envolée, j’voudrais que vous m’épauliez.
Je vais tout vous raconter, et ça n’me fait pas rigoler.

Oui ça nous serre la gamelle, oui ça nous prend pour des chiens.
Et t’as pas vu les matons, ils font les fachos toute l’année.

Moi j’ai bien analysé, Eux ils aiment pas les Arabes.
J’me rappelle j’ai cantiné, et ils ont enlevé tout mon rab.

J’avais pris des Malboro, et beaucoup de Phillip Morris
Ils m’ont dit que c’était trop, je m’appelle pas Boris.

Hé attend y’a la promenade, où y’a vraiment rien à faire.
Nous on fabrique des ballons, pour le moment ça fera l’affaire.

Si jamais du veux pisser, dans la promenade le pissoir,
La vie de ma mère c’est bouché, et c’est vraiment dérisoire.

Ah putain le robinet, qui s’trouve à l’opposé,
moi j’ai connu des chaleurs où il était pas allumé.

Et moi j’avais ma bouteille d’eau, j’pouvais pas la descendre.
Ils sont vraiment déterminés, ils veulent nous réduire en cendre.

Ceci n’est pas le pire, ils veulent nous faire peur.
Y’en a pour qui ça marche

J’remonte de promenade, des pigeons dans le bâtiment
Et ça nous sert la gamelle, accompagné de leurs excréments.

NB : Texte non fini pour L’Envolée. Je vous l’envoie dans l’urgence des conditions de détention que nous subissons. »

Proposer un complément d'info

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par une administratrice du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Derniers articles de la thématique « Répression - Justice - Prison » :

> Tous les articles "Répression - Justice - Prison"

Vous souhaitez publier un article ?

Vous organisez un évènement ? Vous avez un texte à diffuser ?
Ces colonnes vous sont ouvertes. Pour publier, suivez le guide !
Vous avez une question ? Un problème ? N’hésitez pas à nous contacter