"On lance une invitation aux travailleuses de la terre, des forêts et des mers du grand ouest car on a envie d’organiser un temps de rencontre entre paysannes, porteuses de projet, salariée agricoles. Mais l’invitation concerne aussi toutes celles qui se reconnaissent dans l’appellation, de la personne qui s’organise sur l’autonomie alimentaire en passant par celle qui ne sait pas où vraiment se placer entre membres de collectifs paysans ou personne en connexion au vivant par son quotidien.
On peut vivre en ruralité et ne pas se sentir concernée par les enjeux liés à la terre et au vivant. Tout comme on peut habiter en ville et au contraire évoluer dans un contexte où ces enjeux sont très prégnants.
Dépasser le clivage urbaines/rurales, bio/pas bio pour nous concentrer sur ce qui nous lie et qui constitue une force. En présence comme en devenir.
Nous permettre de trouver le commun qui fera émerger une voix peu audible encore aujourd’hui : celle d’un éco-feminisme de terrain en lutte contre le modèle agricole dominant et patriarcal. Un éco-feminisme paysan porteur d’analyses et de solutions.
Historiquement et scientifiquement les femmes ont été essentialisées, naturalisées, ramener à leur « nature » faible, animale, esclave de leurs émotions. En opposition au monde des hommes où règnerait la raison, la logique, la maîtrise des sentiments, en un mot la victoire de la culture sur la nature. Cette naturalisation des femmes a ainsi permis de les inférioriser, les disqualifier pour justifier leurs exploitations.
Tout comme celle de la nature réduite à un champs de ressources inertes, disponible de manière illimitée et sur laquelle nous aurions tous les droits, celui de se servir, de piller, violer, asservir. Cette vision hégémonique de la culture sur la nature est largement ancrée dans le patriarcat et le capitalisme a su en tirer profit.
Majoritairement le féminisme matérialiste a pris le parti d’extraire les femmes de toute référence à leur « nature » pour qu’elles s’émancipent et revendiquent une liberté à l’égal des hommes sans être subordonnées à leur corps ou à tout raccourci essentialiste.
Inspirées par de nombreuses lectures, discussions et courants, aujourd’hui nous avons envie d’aller au-delà.
Déjà en nous liant à la « nature » comme compagne de domination patriarcale mais aussi en affirmant que la vision essentialiste des femmes, comme la vision productiviste de la « nature » est une construction patriarcale dont nous devons nous défaire.
L’assimilation historique des femmes à la nature les a assignées au travail du care, à la prise en charge du travail domestique espace de subsistance et de survie de la famille au sens élargie.
De cette assignation socialement élaborée et de notre histoire commune nous avons tiré une sensibilité, une analyse et une expertise dans notre rapport au vivant.
Ce qui nous intéresse aujourd’hui est de réussir à articuler notre expérience de terrain avec cette expertise.
L’agriculture paysanne est mise à mal par les lobbies agro-industriels, le changement climatique, l’inflation…
Pourtant c’est bien cette agriculture paysanne qui peut répondre aux enjeux actuels et futurs. Qu’ils soient sociaux, environnementaux ou alimentaires.
Seule l’agriculture paysanne est en capacité de nourrir les gens en travaillant en cohérence avec le vivant, en lui rendant sa juste place. Non pas comme matériau sans âme mais comme compagnon de travail. Nous pouvons préserver l’eau, l’air, le bocage.
C’est cette agriculture qui sait travailler en respectant les sols, les animaux, le sauvage, les humains.
Nous pensons que l’agriculture paysanne trouve ses racines dans un rapport à la nature et au vivant en opposition aux logiques de domination et d’exploitation.
Nous vous invitons donc à casser les clôtures physiques et mentales de nos statuts (MSA, salariée, RSAiste..) pour voir quelle richesse et quelle justesse sont entre nos mains. De partir de nos savoir-faire, vécus et expériences afin de créer du savoir qui émerge du terrain et ne plus laisser aux seuls intellectuels l’apanage d’écrire notre histoire. Et enfin pour creuser le lien tenu entre agriculture paysanne et éco-feminisme et voir comment les articuler pour donner une nouvelle dimension à nos luttes et pratiques paysannes !"
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